Depuis le 1er janvier 2020 il est obligatoire pour les entreprises d’élire un référent harcèlement sexuel. Atouts-Formations vous propose de répondre aux questions suivantes : pourquoi est-il obligatoire d’avoir un référent harcèlement sexuel ? Dans quelles conditions doit-on élire un référent harcèlement sexuel ? Et quelles sont les missions du référent harcèlement sexuel ?
Quel lien entre la Loi Avenir Professionnel, le référent harcèlement, le CSE et le code du travail ?
Mise en place en septembre 2017, au 1er janvier 2020 la réforme du code du travail substitue le CSE (Comité Social et Economique) au trio : délégués du personnel, comité d’entreprise et CHSCT (Comité d’Hygiène, de Santé et des Conditions de Travail).
L’objectif de cette réforme est de simplifier les instances de représentation du personnel. Le CSE voit pour conséquence majeure au niveau des entreprises de rendre obligatoires des prérogatives jusqu’alors facultatives. Ainsi depuis le 1er janvier 2020 toutes les entreprises de plus de 11 salariés doivent être dotées d’un CSE.
Cette réforme fait partie des dispositions prises par la Loi dite Loi Avenir Professionnel , c’est-à-dire la Loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.
Cette loi est organisée en 3 volets :
- un axe tourné vers une société de compétences (qui englobe notamment la réforme du CPF et la suppression du CIF),
- une réforme de l’indemnisation du chômage qui impacte particulièrement les travailleurs indépendants et modifie également les indemnisation des démissionnaires,
- une orientation vers l’emploi qui comprend de nombreux axes tels que l’emploi des personnes en situation de handicap, les écarts de rémunération entre femmes et hommes. C’est ici que s’inscrit la lutte contre le harcèlement sexuel.
« Pour prévenir, agir et lutter contre les agissements sexistes et les faits de harcèlement sexuel au travail, la Loi pour la Liberté de choisir son avenir professionnel oblige à désigner un à deux référents par entreprise. »
(Ministère du Travail) L’obligation légale d’élire un référent harcèlement sexuel concerne toutes les entreprises françaises de 250 salariés et plus.
Pour les entreprises qui ne sont pas concernées, c’est donc une démarche volontaire. Certaines TPE et PME ont décidé de former leur personnel à cette thématique car elle reflète une problématique et une prise de conscience importantes. Cette démarche permet :
- d’assurer le bien-être des personnels sur leur lieu de travail : éviter les conflits lors des travaux de groupes et assurer la cohésion d’équipe a démontré des conséquences positives sur la productivité et l’implication professionnelle des personnes, (cf. étude de l’INRS)
- se montrer impliqué.es dans le bien-être au travail et sur des questions de non-discrimination est aussi vecteur de notoriété pour les marques qui intègrent une démarche de sensibilisation et de prévention.
Les missions du référent harcèlement sexuel ?
Le référent doit former et sensibiliser les personnels et mettre en œuvre les procédures internes spécifiques : il a pour mission « d’orienter, d’informer et d’accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes. » (article L. 1153-5-1 du code du travail)
Le référent pourra :
- Mettre en place des actions de sensibilisation et de formation auprès des salariés et du personnel encadrant
- Il devra être capable d’orienter des salariés vers les autorités compétentes selon la situation (inspection du travail, médecine du travail, défenseur des droits)
- Concernant la mise en œuvre de procédures internes, elles devront permettre de signaler des situations de harcèlement sexuel ou d’agissement sexiste et de faire en sorte que ces situations soient traitées.
- Il définira un processus afin de signaler, et de mener une enquête interne suite à un signalement ou à la détection de faits de harcèlement ou de situations à risque.
Cette dernière obligation est issue de l’Accord national interprofessionnel (ANI) du 26 mars 2010 sur le harcèlement et la violence au travail. Cette procédure n’est pas formalisée mais le Code du Travail précise que l’entreprise doit « prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs » (article L. 4121-1 du code du travail).
Le Guide contre le harcèlement sexuel publié par le Ministère du Travail propose une liste d’ indicateurs pour évaluer les risques de harcèlement sexuels et pour détecter des agissements inappropriés ainsi que des moyens d’action préventifs.
C’est dans ce cadre que s’inscrit la démarche de formation des membres du CSE. Le Code du Travail précise effectivement que les membres de la délégation du personnel et le référent doivent bénéficier d’une formation nécessaire à l’exercice de leurs missions (article L. 2315-18 du code du travail).
Les entreprises qui se sont lancées dans la prévention contre le harcèlement
Deux ans après #metoo et un an après « La Ligue du LOL » et les dénonciations, polémiques et débordements qui en ont découlé, s’est concrétisé le besoin de prioriser la question du comportement au travail dans la vie des français.
Il y a eu les précurseurs, avant même les 1ers #metoo, RadioFrance avant déjà lancé son Allo Discrimin’. En 2017 après plusieurs années sans succès, le numéro d’Allo Discrimin’ est externalisé et propose l’accompagnement par des psychologues, elle enregistre alors 87 demandes de salarié.es en un an.
France Télévision avait également débattu de ces questions et mis en place des actions de prévention dès 2017 avec son accord sur la « Qualité de Vie au Travail ».
En 2018, la Direction de Le Monde a été alertée par plusieurs salariées qui ont pointé du doigt un chat interne qui avait tendance à « déraper » vers l’homophobie, le racisme et le sexisme. Après avoir traité le problème et s’être séparé de plusieurs salariés, Le Monde a mis en place une série de formations pour toutes les équipes de ressources humaines, les représentants du personnel et les managers.
Ces quelques exemples montrent que même des entreprises qui disposaient de services de ressources humaines, de hiérarchie capable d’alerter sur des agissements inappropriés, se sont vues dans l’obligation de recourir à des méthodes spécifiques pour remédier à des comportements qui restaient jusqu’alors tus et subis par ceux et celles qui en faisaient les frais. La mise en place de moyens pour remédier à ces questions est maintenant non seulement possible mais aussi obligatoire pour la majorité des entreprises.
L’avenir de la qualité de vie au travail
L’implication de l’Etat dans les problématiques quotidiennes des salarié.es et le volontariat des entreprises sont positifs. Ils démontrent une ouverture de la réflexion et de la prise de conscience quant aux répercutions des comportements sur le lieu de travail et au quotidien (dans les médias, etc.).
Cependant, cette prise de conscience demande encore à mûrir : licencier des personnes qui ont démontré des comportements inappropriés ne doit pas être une finalité. Caroline De Haas, porte-parole de Osez le Féminisme déclare que : « Que ce soit dans un sens ou dans l’autre, la sanction pas proportionnée n’est pas efficace. Il ne faut pas sous-réagir ou sur-réagir, il faut réagir justement. »
La route vers l’inclusion et la fin des discriminations, qu’elles soient professionnelles ou non, est encore longue. Les démarches qui tendent vers une amélioration de la qualité de vie au travail (QVT) démontrent de réelles avancées… souhaitons qu’elles se répercutent sur tous les publics et dans tous les domaines !
Références :
- Guide pratique HARCÈLEMENT SEXUEL ET AGISSEMENTS SEXISTES AU TRAVAIL : PRÉVENIR, AGIR, SANCTIONNER édité par le Ministère du Travail
- Institut national de recherche et de sécurité (INRS) : brochure Risques psychosociaux, bien-être et qualité de vie au travail
- Loi n°2018-771 du 5 septembre 2018 : le référent harcèlement sexuel est une nouvelle fonction issue de cette loi.
- Article L. 4121-1 du Code du travail : obligation de prévention pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs
- Article L. 1153-5-1 du Code du travail : accompagner les salariés en matière de lutte contre le harcèlement sexuel et les agissements sexistes
- Article 222-33 du Code pénal : le harcèlement sexuel est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 € d’amende
- Article L. 2315-18 du Code du travail : le référent bénéficiera de la formation nécessaire à l’exercice des missions en matière de santé, sécurité et conditions de travail
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